[RETROGAMING] Blade Runner / PC
BLADE RUNNER
Support : PC (DOS, Win 95)
Éditeur : Virgin Interactive
Développeur : Westwood Studio
Genre : Enquête
Nombre de joueurs : un joueur
Media : 4 CD ROM
Sortie : 1997
En 1968, Philip K Dick écrit le roman "Do Androids dream of Electronic sheep ?", plus tard connu sous le nom de Blade
Runner. L'auteur y dépeint un San Francisco dépressif en 2019 où une unité de police spéciale traque les androïdes, notamment les modèles Nexus 6 grâce au test d'empathie de Voight-Kampff. Il ne
s'agit pas d'une exécution : le terme utilisé est "retrait".
En 1982 sort au cinéma Blade Runner, réalisé par Ridley Scott. Le film est une adaptation du livre, pas directement une retranscription : on y suit le même héros, Rick Deckard, mais le contexte
est légèrement différent. Échec commercial du film qui pourtant deviendra un succès, jusqu'au statut de film culte. En 1997, c'est au tour du studio Westwood de se pencher sur l’œuvre et de
l'adapter en jeu vidéo. C'est toutefois le film et non le livre qui a servi de base.
Notre hibou vous plait ?
Dans le jeu de 1997, vous n'incarnez pas Rick Deckard mais Ray McCoy, une fraîche recrue de l'unité Blade Runner. Après une séquence
d'intro, le jeu débute sur une enquête : un massacre d'animaux a eu lieu chez Runciter, McCoy est envoyé sur place. Le maniement
du personnage se fait à la souris : vous cliquez au sol pour déplacer le personnage, et lorsque le pointeur devient vert, vous pouvez interagir (parler, inspecter ou ramasser un indice). Lors des
conversations, un menu apparaît, vous permettant de choisir le sujet. S'il n'en reste qu'un, il est automatiquement abordé lors de la conversation.
L'intégration des cinématiques avec le jeu proprement dit est véritablement incroyable, car on distingue à peine les deux. Nombre de
séquences sont d'ailleurs des reproductions exactes de scènes du film : le fan jubilera littéralement de plaisir, le non-initié y verra une immersion réaliste dans une ville futuriste.
Pour être honnête, il faut aussi noter que les graphismes accusent leur âge : la résolution, alors acceptable, ne peut être modifiée,
ce qui nous donne des personnages relativement pixelisés sur les machines modernes, et qui se mettent parfois à clignoter (dans ce cas, faite un alt-tab pour revenir au bureau, puis revenez au
jeu). Les décors quant à eux ne souffrent d'aucun problème et retranscrivent bien l'ambiance de l'oeuvre.
J'ai vu tant de choses que vous, humains, ne pourriez pas croire.
On trouve régulièrement des photos durant l'enquête. Elles seront automatiquement chargées dans les machines ESPER (une dans
l'appartement de McCoy, et une au QG de la police) et permettront comme dans le film de trouver des indices en regardant certains éléments de l'image sous d'autres angles.
Concrètement, dans le jeu, l'ESPER s'utilise en cadrant avec la souris une zone d'intérêt : le logiciel zoome alors dessus voir change
automatiquement l'orientation si vous avez trouvé un indice utilisable.
L'appartement ne sert pas juste à utiliser le ESPER : on y trouve Maggie, la chienne de McCoy (une vraie, pas artificielle). C'est
aussi là que le personnage peut faire avancer le temps (et l'histoire) en utilisant un livre. En allant sur le balcon, vous déclencherez l'écoute d'une des musiques que Vangelis a réalisée pour
le film, et qui est ici parfaitement retranscrite. En fait, toutes les musiques viennent du film et sont magnifiques (sauf si vous détestez Vangelis).
Pour clore sur l'aspect sonore, j'ajouterai également que les voix françaises sont très réussies, retranscrivant bien la personnalité
des intervenants, même si ça fait étrange pour un passionné du film d'entendre Gaff parler autant.
Les déplacements se font à pied ou en véhicule. Selon l'endroit où vous irez, vous suivrez la trace de Rick Deckard qui n'est jamais vu
mais régulièrement mentionné de manière subtile : en allant à la Tyrell Corporation pour un rendez vous avec le grand chef, on apprend que McCoy est le second policier à venir.
Chaque lieu a son intérêt. Le QG de la police permet par exemple d'échanger vos indices avec les autres blade runners en service,
Crystal et Gaff. On peut également s’entraîner au tir, récupérer des infos au laboratoire, interroger les suspects en garde à vue, ou discuter avec le chef pour recevoir des primes en fonctions
des retraits de réplicants réalisés. Ces primes servent à acheter des munitions plus performantes auprès de Bullet Bob.
Je ne suis pas dans le business :
c'est moi le business.
Le but de l'unité Blade Runner est de réaliser le retrait des réplicants sur Terre où leur présence est illégale. Afin de les dépister,
il existe un test permettant de détecter les réactions empathiques, ou leur absence. Vous commencez par calibrer la machine avec quelques questions en ajustant un curseur, puis vous choisissez
l'intensité émotionnelle de la question que vous posez. Lorsque votre interlocuteur répondra, vous verrez la dilatation de sa pupille et les indicateurs humain/réplicant se déplaceront, vous
permettant de déterminer si la personne devant vous est artificielle.
Parfois il n'y a pas besoin de test, et vous comprendrez immédiatement de quoi il retourne en discutant. Et là vous avez le choix :
soit vous pourchassez votre proie et vous l'abattez (bouton droit de la souris pour sortir l'arme), gagnant au passage une prime, soit vous l'épargnez. Vos choix ont un impact profond sur la
relation avec vos collègues et sur la fin du jeu. Attention aussi sur qui vous tirez : si vous éliminez un humain, vous aurez commis un meurtre et le jeu se terminera.
Au niveau de la durée de vie, finir le jeu ne demande pas plus d'une dizaine d'heures. C'est peu pour quatre CD, mais la rejouabilité
est importante et pour cause : chaque partie est générée aléatoirement en la démarrant. Durant chaque partie, le jeu comporte
toujours les mêmes personnages, mais c'est leur rôle qui va changer, et les indices. Ainsi, dans une partie, les indices vous pousseront à la conclusion que untel est une réplicante, mais vous
constaterez peut-être une autre fois qu'elle est humaine. Mention très bien pour le character design des protagonistes : les
acteurs principaux ont tous une allure reconnaissable et mémorable.
Constat parfait pour le jeu de Westwood ? Malheureusement non, car les développeurs ont ajouté des scènes dont on se serait volontiers
passé, qui apportent une difficulté inutile et préjudiciable au plaisir de jeu. L'une de ces scènes se déroule dans le secteur génétique, chez Moraji le fabricant de peau, et se découpe en
deux séquences :
- première séquence, vous entrez chez Moraji et le trouvez enchaîné près d'une bombe : vous sortez votre armez et tirez sur la chaîne
(ou sur Moraji mais ce n'est pas le but). Vous devrez alors sortir de l'atelier,
- deuxième séquence, vous venez de sortir : vous devez alors cliquer très rapidement à un endroit précis pour échapper au souffle de
l'explosif.
Il m'a fallu de très nombreux essais pour parvenir à survivre, ce qui est relativement décourageant : celui qui s'attend simplement à
un jeu d'enquête sera très frustré de se voir ainsi bloqué de manière artificielle.
Si on ne se laisse pas rebuter par quelques scènes aussi douloureuses que facultatives (par chance peu nombreuses), Blade
Runner a de quoi séduire. Le fan découvrira une adaptation extrêmement fidèle au film, sans pour autant régurgiter le scénario de Ridley Scott, et prendra plaisir à marcher dans les pas
d'Harrisson Ford. Le néophyte quand à lui aura une enquête complexe, mature et riche en émotion avec une grande rejouabilité et des séquences de toute beauté. Le tout servi par une réalisation
technique de qualité en dépit de son âge vénérable.
SUPPOS : 5,5/6